Chapitre 3 Une petite Algérie (1955-1958)
« La guerre d’Indochine a été perdue ; un autre théâtre d’opérations est ouvert en Afrique du Nord, d’autres s’ouvriront bientôt dans l’Union française. »
Lieutenant-colonel Roger Trinquier, 9 juin 1955.
« Une fois encore, la leçon d’Indochine est significative : pour avoir trop présumé de nos forces et mésestimé celles de l’adversaire, nous sommes allés à un échec définitif. Il nous appartient de ne pas renouveler une telle erreur au Cameroun. »
Lieutenant-colonel André Trancart (chef de 1a section de coordination FOM), 11 octobre 1955.
« Il y a deux manières de combattre, l’une avec des lois, l’autre avec la force. La première est propre aux hommes, l’autre nous est commune avec les bêtes. » Bien connue, la phrase de Machiavel s’applique à merveille au Cameroun des années 1950. Tandis que les autorités françaises s’apprêtent, avec la loi-cadre, à réformer partiellement la gouvernance coloniale et à « africaniser » quelques postes à responsabilité, elles s’organisent en parallèle pour éliminer par la force les gêneurs qui pourraient profiter de cette réforme institutionnelle apparemment « libérale ». L’autonomisation politique des colonies, qui profite à une petite élite sélectionnée pour sa « modération », s’accompagne d’une répression sauvage des mouvements populaires qui souhaitent rompre les liens de dépendance franco-africains et qui sont par conséquent catalogués comme « radicaux ».